Pour DonPerry, étudiant au RAC, la création est un processus de transformation. Chaque projet lui offre une nouvelle occasion d’évoluer au niveau sonore et émotionnel, le rapprochant ainsi de la catharsis. Son dernier single « WIND BLOWS » le voit exprimer une agonie lyrique sur des sons R&B minimalistes, révélant qu’il a le cœur fermement sur la main.
Décrivez le son de DonPerry ?
Ça peut être n’importe quoi… du R&B au hip-hop ou du dancehall au reggaeton !
Le trait le plus important chez un collaborateur ?
S’il y a de bonnes vibes entre nous.
Votre plus grande source d’inspiration ?
La musique, les sentiments et les émotions bruts.
Votre restaurant préféré à Montréal ?
Je cuisine, donc je ne vais pas vraiment au restaurant !
Si je n’étais pas musicien, je serais… un créateur de mode ou un architecte.
Bien que DonPerry termine ses études, il visera toujours être le premier de sa cohorte. Depuis le début de sa carrière artistique, le créatif Philippino-Canadien s’est concentré sur des développements constants autant que l’accroissement d’une communauté, tout en se faisant remarquer sur la scène montréalaise. En abordant chaque élément de son, de l’écriture des chansons à la postproduction, l’artiste peint avec un large pinceau – mais son objectif est de saisir de nouvelles occasions et de rester fidèle à son histoire personnelle.
Face aux turbulences et aux incertitudes qui marquent le passage à l’âge adulte, DonPerry prouve que ces détours peuvent êtres transformés en créations significatives. Sa musique, influencée par les pionniers du R&B canadien, reflète les changements omniprésents de la vie, en parallèle avec sa propre histoire. Son dernier album, « WIND BLOWS », continue avec ce motif, exposant une peine d’amour avec une sincérité émouvante.
L’artiste émergeant s’est entretenu avec RAC pour discuter de son évolution musicale et pour faire connaître son point de vue sur les étapes du succès.
RAC : Merci de nous rejoindre ! Commençons par l’essentiel : qui est DonPerry ? Dites-nous en plus sur qui vous êtes, d’où vous venez et comment DonPerry a vu le jour.
DonPerry : J’ai grandi autour de la musique, dans une famille où tout le monde chantait – les familles philippines sont comme ça. J’ai commencé par écrire de la musique et des paroles, et à écouter des chansons à la mode, ce qui m’a vraiment stimulé. Dans ces chansons, je me sentais très ému par le sentiment que les artistes communiquaient lorsqu’ils s’exprimaient, et j’ai commencé à me dire : « Je pourrais faire quelque chose comme ça. »
Quand je suis arrivé au Canada, j’avais 14 ans, et c’est là que j’ai commencé à écouter des artistes comme Drake et PartyNextDoor. Ce genre de musique a retenu mon attention. Plus tard, un ami m’a invité chez lui et j’ai écrit quelques raps. Il a enregistré mes paroles et le résultat était très cool. Bien que mon ami n’ait plus voulu faire d’enregistrement après cette session, je lui ai demandé de m’indiquer quel programme il avait utilisé. À l’époque, j’utilisais l’ordinateur portable ASUS de ma mère et j’ai téléchargé Audacity.
Ensuite, j’ai essayé d’acheter une interface et quelques micros, mais je n’avais aucune idée de ce que je faisais. J’ai continué à chercher des tutoriels sur YouTube pour essayer d’apprendre. Quand j’ai acheté mon MacBook, c’est à ce moment-là que j’ai commencé à prendre les choses au sérieux. C’est la première fois que j’ai senti que je pouvais faire quelque chose de professionnel. J’ai alors commencé à utiliser GarageBand et Logic Pro X, les programmes que j’utilise maintenant. Une grande partie de ma musique est inspirée par le R&B et le hip-hop moderne, la soul et même un peu de rock. J’ai grandi avec tous ces styles de musique. Je ne fais pas attention au genre de musique que j’écoute : si elle sonne bien, et si elle capte mon intérêt, je suis un fan. Je fusionne différents genres dans ma musique – en ce moment, je travaille sur une chanson qui fusionne le R&B, le dancehall et le reggaeton. C’est palpitant de mélanger ensemble tous ces sons.
RAC : Vous avez grandi dans un environnement musical et vous avez commencé à chanter dès votre plus jeune âge. Décrivez le moment où vous avez réalisé que la production musicale était quelque chose que vous vouliez poursuivre.
DonPerry : Lorsque j’ai commencé à m’intéresser à l’enregistrement et à la musique, je ne pensais pas vraiment en faire à l’avenir. À l’époque, c’était juste quelque chose d’amusant à faire. Mais quand j’ai commencé à prendre cette carrière au sérieux et à m’imaginer travailler dans l’industrie musicale, j’ai sorti mon premier album sur SoundCloud. Après avoir fait cet album, j’ai remarqué que mon mixage était mauvais et je me suis dit : « Il doit y avoir quelque chose de plus. » J’ai pensé à faire des études ; j’étais en Nouvelle-Écosse, et il y avait un programme d’enregistrement là-bas, semblable à RAC, mais dans un collège communautaire. Mais en faisant des recherches en ligne, j’ai découvert qu’il y avait de plus grandes communautés d’artistes à Montréal et à Toronto. J’ai décidé de venir à Montréal, ce qui est l’une des meilleures choses qui me soient arrivées, en toute honnêteté.
RAC : Vous citez Drake, PartyNextDoor et Bryson Tiller comme vos principales inspirations. Comment ces artistes façonnent-ils votre travail unique, et qu’appréciez-vous dans leur créativité ?
DonPerry : Je ne me limite pas juste à leurs chansons, mais à l’ensemble de leurs œuvres. J’aime qu’ils soient si polyvalents. C’est la façon dont ils disent les choses, la façon dont ils les livrent, qui m’inspire vraiment – l’idée que vous pouvez être vous-même, même si vous essayez d’exprimer quelque chose. J’aime leur flow.
La première fois que j’ai écouté ces artistes, j’en ai écouté toutes les couches qui forment leur art : leur production, leur écriture et leur mixage. Ces artistes et leurs projets m’ont marqué et ils m’ont laissé des souvenirs – leurs chansons sont nostalgiques.
RAC : Votre dernière chanson, « WIND BLOWS », découle de votre propre histoire dans une relation toxique. Décrivez votre point de vue sur la capacité de la musique à déballer et à transmettre des émotions.
DonPerry : Quand je fais de la musique, écrire des paroles me permet de dire ce que je veux, de la manière dont je veux le dire. C’est tellement plus facile d’exprimer ce que l’on ressent avec la musique – il y a toujours une sorte de référence ou source d’inspiration. Personnellement, je ne peux pas faire quelque chose à partir de rien ; si je fais quelque chose qui n’a pas de sens pour moi, je peux reconnaître que ça sonne bien techniquement, mais qu’est-ce que ça signifie pour moi personnellement ? C’est l’une des grandes choses auxquelles je pense toujours lorsque je fais de la musique : cela a-t-il une signification pour moi ?
RAC : Racontez-nous le parcours de la réalisation de « WIND BLOWS ». Quel a été votre aspect préféré du processus de création ?
DonPerry : L’angle que j’ai choisi dans cette chanson est en fait inspiré par d’autres artistes comme Brent Faiyaz et Frank Ocean. J’ai essayé de suivre leur chemin en termes d’écriture et de production, et j’ai apprécié tout le processus de la création de cette chanson. C’était un véritable défi : j’ai coupé et traité l’échantillon pour cette chanson et il a fini par être vraiment décalé. J’ai aussi essayé de programmer la batterie, mais ça n’a pas vraiment marché. Lorsque j’ai chanté la chanson pour la première fois, et que la première mélodie est sortie de ma bouche, j’ai décidé qu’elle serait brute – le mixage serait brut, et ne serait pas trop traité.
En fin de compte, il s’agit de prêter attention à la direction que la musique veut prendre et de toujours travailler afin de le découvrir. C’est facile de se dire : « Je serai célèbre un jour », mais je ne veux pas y penser pour l’instant. Je veux juste continuer à travailler. Chaque jour, pense « Bon, allons faire un beat » et c’est tout… du moins, c’est le processus créatif que je développe. Si je manque un jour de musique, j’ai l’impression d’avoir déjà abandonné. Je dois continuer à bouger, à créer, à fabriquer, à m’exprimer – c’est ce que j’aime dans cette carrière. Si jamais le moment arrive où je ne fais pas de musique, c’est parce que j’ai abandonné.
RAC : Depuis le début de votre carrière, vous avez aussi partagé votre son sur de nombreux projets hip-hop avec des artistes comme TMB Niicky. Quel rôle joue la collaboration dans le développement de votre propre musique ?
DonPerry : En ce qui concerne la collaboration, mon approche est la suivante : « Si je te feel, on aura un bon flow ». Si je n’aime pas ta musique et si nous ne nous entendons pas, nous n’allons pas travailler ensemble. Pour moi, le processus de réaliser des chansons, c’est quand une vibe et des histoires partagées sont combinées en une seule pièce d’art. Par exemple, TMB Niicky vient de la Nouvelle-Écosse, d’où je viens, et je ne le connaissais pas en tant que personne avant. Au lycée, un de mes camarades de classe produisait des rythmes pour moi et il a envoyé une chanson que nous avions écrite tous les deux à TMB Niicky. Je me souviens avoir pensé « Yo, ce mec a vraiment du talent ». TMB Niicky m’a contacté, on a commencé à parler et à s’intéresser au travail de l’autre. C’est vraiment formidable, en tant qu’artiste, d’avoir ce genre de connexion avec d’autres artistes dans votre ville.
Travailler dans des studios locaux avec des artistes locaux est l’une des choses que je préfère faire. Quand j’étais chez moi, en Scotia, il y avait un studio local appelé Keke Beatz où le frère du propriétaire connaissait mon père. Nous avons été connectés de cette façon, et il m’a invité au studio où nous avons écrit une chanson et passé un bon moment ensemble. J’aime beaucoup collaborer – peu importe si c’est avec un local ou avec quelqu’un d’une grande ville. Il s’agit toujours de la musique.
En ce moment, j’enregistre avec quelques artistes. Je travaille avec Alhandra ici à RAC ; j’ai fait un beat pour elle et je suis en train de mixer et d’enregistrer sa chanson. C’est une ambiance différente avec une expression différente des sentiments. Lorsque vous êtes avec une artiste et qu’elle partage ces émotions avec vous, c’est un moment très spécial parce qu’elle s’ouvre à vous. De leur point de vue, je sais ce que c’est que d’être au micro, quand il y a quelqu’un qui attend que vous livrez la meilleure version. Je sais ce que c’est de se sentir vulnérable.
RAC : Quels ont été les principaux éléments à retenir de votre carrière dans la production musicale ?
DonPerry : Je suis toujours à la recherche de ces grandes réalisations, mais pour l’instant, je suis simplement heureux de pouvoir écrire de la musique. L’une des choses que j’ai apprises c’est de continuer de faire de la musique et de la rendre authentique. Et aussi, je comprends à quel point c’était important pour moi d’aller au RAC et de rencontrer des gens dans la ville. À Montréal, j’ai visité quelques studios et je suis allé au NBS Studio, où j’ai participé à une session avec le producteur de Skiifall, YAMA//SATO. YAMA//SATO est quelqu’un qui m’a vraiment inspiré, du point de vue de la production et de sa façon de travailler. C’était une session énorme, c’était fantastique – cette nuit a été une grande inspiration, un grand rafraîchissement pour moi en tant qu’artiste. Elle m’a rappelé que je pouvais faire quelque chose comme ça et le transformer en une musique qui sonne bien.
Quand je fais une chanson, même si elle est bonne, je me dis « Je ne peux pas rester sur cette chanson, parce que je ne vais pas l’aimer si je continue à l’écouter ». Je dois en faire plus, je dois faire une autre chanson, et puis une autre. Je n’ai même pas de chanson préférée ; je les ai tellement écoutées, tellement mélangées, que l’intérêt que je leur porte n’est plus le même. C’est une question d’expansion. C’est ce que je veux faire maintenant : je veux aller de ville en ville, et développer mes relations au Canada. Je veux aller à Toronto et entrer en contact avec les étudiants du campus RAC là-bas. On ne sait jamais, je pourrais peut-être rencontrer quelqu’un qui va vraiment exploser – les artistes sont des artistes, peu importe qui vous êtes, tant que vous ressentez votre propre rythme artistique et que vous créez quelque chose de bien.
Il m’arrive même d’écrire une chanson sur le champ. Un week-end, après avoir enregistré une chanson, j’ai immédiatement commencé à travailler sur une autre en studio. C’est incroyable de voir le peu de temps qu’il faut pour créer quelque chose de merveilleux quand un producteur et un artiste s’entendent bien. Ce genre de style de vie est ma drogue. J’ai toujours envie d’y revenir.
Mais parfois, j’ai besoin de faire une pause et de revenir à ce que je suis en train de faire. Je me mets tellement de pression en tant qu’artiste. Il m’est arrivé d’aller devant mon ordinateur en pensant que j’allais faire une chanson incroyable, et il s’avère que je ne suis même pas capable de faire une progression d’accords. Ce genre de choses peut être décourageant, mais à chaque fois, il faut se dire : « Je me fiche de ce qu’on va faire, ou du genre, mais je sais que ça va être excellent ». J’essaie de garder ça à l’esprit quand j’enregistre.
RAC : Comment faites-vous l’effort d’évoluer en tant qu’artiste ? Qu’est-ce que vous pensez avoir encore à apprendre ?
DonPerry : L’apprentissage n’est jamais terminé, ce voyage dans cette industrie n’a pas de fin. Chaque fois que je fais quelque chose, j’apprends quelque chose, ce qui est, je pense, l’un des meilleurs aspects du métier d’artiste. J’ai l’impression que si je n’apprends pas, je m’enlise en faisant la même chose, et c’est à ces moment-là que je finis par penser que je devrais abandonner. C’est pourquoi j’essaie d’avoir l’esprit ouvert et de toujours apprendre quelque chose de nouveau. Si je suis avec quelqu’un de plus expérimenté que moi, je m’assieds et j’écoute cette personne. Et même si vous n’êtes pas plus expérimenté, vous avez toujours une paire d’oreilles différente : vous entendez les choses différemment, vous avez un cerveau différent. Je mets de la valeur dans ces idées aussi.
J’adore l’aspect d’exploration avec le mixage, l’écriture de chansons et leurs production. Je passe toujours du découpage d’échantillons à la création de choses à partir de rien. Parfois, il peut être difficile de faire des progressions d’accords ou de couper des échantillons parce que je trouve que ça ne sonne pas bien. Il s’agit de savoir si la musique a un sens dans ma tête et si elle est fluide. Et si une chanson ne fonctionne pas, je peux en reprendre l’idée principale et l’intégrer à un autre projet. C’est l’une des principales techniques que j’utilise : mélanger les choses.
Il s’agit de commencer des choses. C’est seulement en commençant quelque chose que vous le terminerez.
RAC : Merci encore d’avoir partagé ce moment avec nous ! Pour conclure, qu’avez-vous de prévu pour le reste de l’année 2022 ?
DonPerry : J’ai terminé le tournage du vidéoclip pour « WIND BLOWS ». Le clip est tourné en VHS, et le vidéographe est extraordinaire ; j’ai hâte de le diffuser. J’ai aussi remixé la chanson, et j’y ai ajouté un twist pour qu’il y ait une transition vers du hip-hop pur, similaire à ce que font Travis Scott et JACKBOYS. Quant à mon single avec Alhandra, « Special », j’ai fini de le masteriser. Il ne reste plus qu’à l’enregistrer auprès de la SOCAN et à le sortir.
Il faut simplement continuer à progresser. Sinon, on devient trop confortable, on se trouve trop bon. C’est pourquoi je continue d’aller de studio en studio, à m’inspirer davantage et à recueillir des informations auprès de mentors. En fait, je viens de visiter un studio de rock alternatif et il se pourrait que j’y enregistre à l’avenir. Je vais continuer à nouer des liens avec les gens, à visiter des studios différents et à discuter avec les gens.
Dans l’ensemble, je reste ouvert avec mes plans. J’ai l’intention d’économiser, de voyager à travers le Canada pour poursuivre ces contacts et, si tout va bien, d’obtenir un placement dans le futur.
Texte écrit par Rebecca Judd
Illustration par Yihong Guo